L’INSTRUMENTALISATION ET L’INCIVISME DES DOZO DANS LE DEBAT POLITIQUE IVOIRIEN : DES OBSTACLES A LA SECURITE INTERIEURE, AU DIALOGUE POLITIQUE ET AU PROCESSUS DE LA RECONCILIATION NATIONALE (2002-2015)

  • DATRO Okobé Noël Université Alassane Ouattara, Bouaké (Côte d’Ivoire)
  • Dr. BLEY Hyacinthe Digbeugby Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody (Côte d’Ivoire)
Keywords: instrumentalisation, incivisme, Dozo, débat politique national, dialogue politique, reconciliationnationale

Abstract

Les Dozo sont des chasseurs traditionnels d’origine Mandé-Bambara et Malinké en Afrique de l’Ouest regroupés en une confrérie initiatique et exotérique. Leur existence remonte au XIIIe siècle avec la fondation de l’Empire du Mali, dans le Soudan Occidental. Le dozoya repose fondamentalement sur la croyance aux divinités (jinh) ou aux génies de la brousse. Les Dozo, au terme de leur initiation deviennent des individus peu ordinaires, pacifiquesmais craints de tous pour leurs pouvoirs mystiques aigus et du don d’ubiquité qui les caractérise. Dotésd’un savoir, savoir-faire et savoir-être, ils se mettent au service de leur communauté.

Au cours de ces dernières décennies, dans l’histoire sociopolitique de la Côte d’Ivoire, ces chasseurs traditionnels se sont illustrés militairement au côté de la rébellion contre le régime en exercice, de septembre 2002 à l’entame du second mandat d’Alassane Ouattara, leur référent politique, en 2015. Depuis lors, ces supplétifsservent de réservoir militaire potentiel disponible au pouvoir en place ;mettant ainsi en péril les fondamentaux de la démocratie et de l’Etat de droit. Ainsi, leur intrusion militaire dans le débat politique national leur confère le statut de soldats-mercenairesà la solde de l’exécutif. Pour service rendu à la rébellion, ils bénéficient d’un traitement particulier et sont intégrés dans l’armée nationale. Ils sont promus à des hauts postes dans l’administration civile et militaire du pays. Du coup, ces mercenaires peu outillés à la chose républicaine, dans l’exercice de leur nouvelle fonction et au regard de l’impunité dont ils jouissent, n’ont cessé de poser des actes de violence contre les populations déjà traumatisées et désarçonnées par la crise. Tous ces faits menacent la sécurité intérieure, l’unité nationale, la cohésion sociale et le processus de la réconciliation nationale.

Il se pose alors la problématique de l’intrusion des mercenaires-dozo dans le jeu politique national et les actes de violence, de crimes économiques et humanitaires dont ils sont auteurs en Côte d’Ivoire.Pour y répondre, l’exploitation rigoureuse et méthodique de plusieurs ouvrages et travaux scientifiques en rapport avec notre sujets’est imposée à nous.Aussi, les zones du Centre, Nord et Ouest (CNO) assiégées par les rebelleset celles du Sud, dites gouvernementales ont servi de cadre d’enquêtes orales auprès de Dozo, chefs coutumiers, victimes, femmes, jeunes, autorités administratives et élus locaux.

Le traitement rigoureux et objectif des informations recueillies a permis de bâtir notre travail autour de trois axes principaux. Le premier axe mettra en relief l’intrusion des Dozo dans le débat politique national, à partir de 2002. Le second point se chargera de montrer les actes d’incivisme des Dozo au cours de la crise. La dernière partie sera le lieu de présenter l’impact de la présence et de l’incivisme des Dozo dans le jeu politique national sur la stabilité du pays.

Author Biographies

DATRO Okobé Noël, Université Alassane Ouattara, Bouaké (Côte d’Ivoire)

Enseignant-chercheur d’Histoire contemporaine (Histoire africaine)

Dr. BLEY Hyacinthe Digbeugby, Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody (Côte d’Ivoire)

Enseignant-chercheur d’Histoire contemporaine (Histoire politique)

 

References

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Published
2022-08-31